Reportage

La crise des personnels de santé limite la riposte au sida

29 février 2008

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L’Alliance mondiale pour les personnels de santé (AMPS) organise le premier Forum mondial sur les ressources humaines pour la santé à Kampala, Ouganda, du 2 au 7 mars 2008.

L’Alliance mondiale, dont l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) est à la fois l’hôte et l’administrateur, a été créée pour identifier et résoudre la crise des personnels de santé. En quoi consiste cette crise et comment a-t-elle un impact sur la riposte au sida?

Les systèmes de santé dépendent de personnels qualifiés

Un système national de santé insuffisant est un des obstacles majeurs à l’élargissement de l’accès à la prévention, au traitement, aux soins et au soutien autour du VIH dans un pays.

La question des ressources humaines pour la santé est un facteur crucial pour une riposte efficace au sida. La pénurie d’agents de santé qualifiés, particulièrement dans des pays à revenu faible et intermédiaire, constitue un véritable défi pour les pays qui doivent répondre aux besoins de leur population en matière de prévention, de traitement et de prise en charge du VIH.

Dans certaines régions d’Afrique subsaharienne la pénurie est si grave qu’elle limite le potentiel d’élargissement des programmes visant à atteindre les Objectifs du Millénaire, notamment le déploiement des traitements contre le sida. – Assemblée mondiale sur la santé, 2005

L’OMS estime que 4 millions de médecins, personnels infirmiers, sages-femmes, administrateurs et agents de santé publique supplémentaires sont nécessaires d’urgence si l’on veut écarter de graves crises dans la fourniture des soins de santé dans 57 pays du monde, dont 26 sont situés en Afrique subsaharienne. L’OMS estime qu’au moins 1,3 milliard de personnes dans le monde n’ont pas accès à des soins de santé même les plus élémentaires.

C’est l’insuffisance des ressources humaines qui a été identifiée comme l’obstacle principal à la fourniture de traitements antirétroviraux et d’autres services liés au VIH dans de nombreux pays en Europe orientale, en Afrique et en Asie. De nombreux systèmes de santé sont insuffisants pour ce qui est de l’accès et de la qualité des conseils pré- et post-test, de l’éducation pour la santé, des soins à domicile, du diagnostic et du traitement des infections opportunistes.

Les gouvernements s’engagent à augmenter leurs effectifs

Lors de la Réunion de haut niveau sur le sida 2006, les Etats Membres de l’ONU ont réaffirmé leur engagement à pleinement mettre en œuvre la Déclaration d’engagement sur le VIH/sida 2001 et à renforcer plus encore l’engagement international sur le sida en:

S’engageant « à fournir des ressources additionnelles aux pays à faible revenu et à revenu intermédiaire pour leur permettre de renforcer les systèmes de santé et les programmes de lutte contre le VIH/sida et remédier aux pénuries des ressources humaines, en mettant au point notamment d’autres modèles simplifiés de fourniture des services et en intensifiant les mesures appliquées au niveau de la communauté pour la prévention, le traitement, les soins et l’appui ainsi que d’autres services de santé et services sociaux. » Cependant, transformer cet engagement des gouvernements à accroitre leur capacité en un nombre accru d’agents de santé sur le terrain est un défi d’une certaine complexité.

Equilibrer stabilité macroéconomique et fidélisation du personnel 

Bien que les fonds sida aient augmenté ces dernières années, les déverser simplement dans le système de santé d’un pays pour renforcer sa capacité n’est pas la bonne solution.

La plupart des économistes s’accordent sur le fait qu’une forte augmentation des apports monétaires provoque un taux élevé d’inflation, une élévation du niveau général des prix des biens et services dans une économie donnée dans un temps donné.

Les gouvernements pensent que des politiques fiscales et monétaires permettant de garder une inflation basse sont nécessaires pour contrôler et gérer leur économie afin de prévenir des chocs soudains et des fluctuations de la croissance potentiellement préjudiciables.

Les pays à faible revenu et forte prévalence du VIH doivent jongler entre le besoin d’investir dans leurs systèmes de santé et la responsabilité de maintenir leur stabilité macroéconomique, sur le plan national et régional.

Ces politiques économiques impliquent le maintien des salaires à un faible niveau et entravent ainsi l’engagement de médecins, infirmières, et agents santé communautaire. Des salaires bas démoralisent les travailleurs et entraînent une baisse de la productivité, ce qui rend très difficile la fidélisation du personnel dans certains pays

L’ouverture des marchés du travail signifie que des professionnels qualifiés migrent en grand nombre vers des pays à haut revenu, appauvrissant les capacités humaines là où elles sont les plus nécessaires.

Forum mondial sur les ressources humaines pour la santé

Le consensus grandit autour du fait qu’il s’agit ici d’une crise mondiale qui exige une action coordonnée.

L’Alliance mondiale pour les personnels de santé (AMPS) a été créée pour trouver et appliquer des solutions à cette crise des agents de santé. L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) en est à la fois l’hôte et l’administrateur.

Pour lancer ce processus, l’Alliance organise cette semaine à Kampala le premier Forum mondial sur les ressources humaines pour la santé. Cette conférence réunit des leaders gouvernementaux, des professionnels de la santé et du développement, la société civile, et des universitaires venant du monde entier qui espèrent cristalliser un mouvement mondial autour de ce sujet.

Les participants exploreront les solutions possibles pour améliorer l’éducation, la formation et la gestion du domaine de la santé et examineront les tendances récentes en matière de migration.