Reportage

Changer les attitudes envers les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes et les personnes transsexuelles au Myanmar

28 décembre 2012

La ministre de la Santé et des Affaires sociales française, Marisol Touraine, remet le Prix Ruban rouge lors de la Conférence internationale sur le sida à Washington, 25 juillet 2012.
Photo : ONUSIDA/Yuri Gripas

Lorsque Thet Mon Phyo a entrepris une opération de changement de sexe en 2005, ses parents lui ont signifié de ne plus revenir à la maison.

« Ils avaient honte et j'étais contrainte d'aller vivre chez ma tante, » se souvient Phyo 34 ans. « Lorsque j'étais jeune, mon père me réprimandait souvent pour mon comportement féminin. Plus tard, mon amant m'a quitté car ses parents l'avaient persuadé que l'amour entre le même sexe n'était pas naturel, » dit-elle.

Au Myanmar, de nombreuses personnes transsexuelles et des hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes (HSH) souffrent de stigmatisation et discrimination extrêmement répandues, ce qui complique les efforts pour stopper la propagation du virus.

Selon l'ONUSIDA, dans certains endroits, la prévalence au VIH parmi les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes et les personnes transsexuelles est bien plus importante que celle de la population en général (9,4% contre 0,53%). Les rapports sexuels entre hommes est illégal au Myanmar et il n'existe pas de lois pour protéger les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes et les personnes transsexuelles de la discrimination.

« Ils sont ridiculisés, voire haïs par certaines personnes, » commente Phyo.

« La discrimination est sur le lieu de travail et même au sein des familles... certains hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes sont rejetés, déshérités et expulsés de chez eux, » ajoute-elle.

Phyo est administrateur de programme chez The Help, Myanmar, un groupe qui se concentre sur la prévention, les soins, l'appui et défend les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes et les personnes transsexuelles ; elle travaille pour assurer que leurs voix soient entendues et que leurs problèmes soient prix en compte au niveau national. Tous les membres de The Help sont des hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes et des personnes transsexuelles et presque la moitié vit avec le VIH.

The Help Myanmar a été récompensé par le prestigieux Prix Ruban rouge lors de la XIXe Conférence internationale sur le sida qui s'est tenue en août pour son travail sur la prévention de la transmission sexuelle du VIH et d'autres maladies sexuellement transmissibles (MST). Le Prix Ruban rouge est le premier prix mondial pour un travail communautaire innovant et exceptionnel dans la riposte à l'épidémie du sida.

The Help, Myanmar travaille pour changer les attitudes, réduire la discrimination et améliorer l'accès aux services anti-VIH. C'est une tâche difficile.

Nous sommes très encouragés par le fait d'être reconnus comme aidant les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes et d'autres dans la communauté. Le Prix Ruban rouge a renforcé notre détermination de poursuivre notre lutte pour la vérité, les droits et les avantages

Thet Mon Phyo, directeur de programme à The Help, Myanmar

Phyo dit que les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes et les personnes transsexuelles ne bénéficient pas des mêmes opportunités d'emploi et de l'accès à un traitement médical correct, ce qui les décourage d'un comportement à moindre risque.

La police agit souvent comme barrière lorsqu'une protection juridique est demandée. Des menaces et des tentatives d'extorsion par certains policiers soulignent la nécessité pour des mesures immédiates afin d'augmenter la sensibilisation du public sur les droits humains et pour que le gouvernement adopte des droits qui protègent les personnes contre la discrimination.

Phyo déclare que les autorités n'ont pas interféré avec le travail de The Help pour augmenter les capacités des hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes et les personnes transsexuelles et mettre en place des groupes d'entraide pour les soutenir. En fait, The Help voit cela comme un signe de coopération tacite. Mais il y a encore un long chemin à faire.

« Nous sommes très encouragés par le fait d'être reconnus comme aidant les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes et d'autres dans la communauté. Le Prix Ruban rouge a renforcé notre détermination de poursuivre notre lutte pour la vérité, les droits et les avantages, » déclare Phyo.

Les efforts de The Help Myanmar pourraient également bénéficier d'un élan suite à la récente nomination de Daw Aung San Suu Kyi comme ambassadrice mondiale de l'ONUSIDA pour zéro discrimination.

« Elle a beaucoup à faire, mais nous lui faisons confiance et nous pensons qu'elle peut faire la différence, » ajoute Phyo.