Reportage

Le Maroc lance une nouvelle stratégie nationale de lutte contre le sida

04 avril 2012

Rencontre entre le Directeur exécutif de l’ONUSIDA Michel Sidibé et la Princesse Lalla Salma du Maroc le 4 avril à Rabat.
Photo : Le Matin.ma

Le Maroc présente une faible prévalence du VIH à l'échelle nationale, estimée à environ 0,15 % de la population totale. Toutefois, des données récentes font état d'une concentration et d'une progression de l'épidémie de VIH parmi les populations les plus exposées dans le pays.

Selon les chiffres du gouvernement, environ 5,1 % d'hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes vivent avec le VIH dans le pays. À Agadir, dans le sud-ouest du pays, la prévalence du VIH chez les professionnel(le)s du sexe est d'environ 5 %. À Nador, ville côtière du nord-est, près d'un consommateur de drogues injectables sur cinq est séropositif au VIH.

Cibler les ressources sur les populations les plus exposées au risque d'infection à VIH : tel est le cœur de la nouvelle stratégie nationale de lutte contre le sida au Maroc. Lancée à Rabat le 3 avril par le Ministre de la Santé, El Hossaine Louardi, cette stratégie nationale sur cinq ans est étroitement alignée sur les objectifs de la Déclaration politique de 2011 sur le sida.

S'exprimant devant un public de plus de 300 partenaires nationaux de la riposte au sida, notamment des responsables gouvernementaux, des représentants de la société civile et des personnes vivant avec le VIH, M. Louardi a expliqué que le plan national vise à réduire de moitié les nouvelles infections à VIH et à faire baisser de 60 % le nombre de décès dus au sida d'ici 2016. Il a ajouté que la stratégie repose sur les principes du droit à la santé, de la responsabilité et de l'implication de tous les partenaires dans la riposte au VIH.

Le Maroc, tout comme l'ensemble du continent africain, a besoin d'un nouveau modèle de financement qui soit conçu et détenu par les pays africains.

Michel Sidibé, Directeur exécutif de l'ONUSIDA

Lors de son intervention à l'occasion de la cérémonie de lancement, le Directeur exécutif de l'ONUSIDA Michel Sidibé a qualifié la riposte au VIH du Maroc d'« exemplaire », puisqu'elle place clairement les individus au centre des efforts de développement national. Il a félicité le Maroc pour son rôle de pionnier régional dans la protection de la santé et des droits humains des populations vulnérables.

Le Maroc a été le premier pays arabe à mettre en place des programmes de réduction des risques pour les consommateurs de drogues injectables, notamment des programmes de traitement de substitution à la méthadone et des programmes aiguilles et seringues. L'expérience a montré que ces programmes sont essentiels à la prévention de la propagation du VIH parmi les populations les plus exposées.

M. Sidibé a cité dans ses remarques un nouveau système d'assistance médicale pour les populations à faible revenu du pays, baptisé RAMED (Régime d’assistance médicale des économiquement démunis). Dans le cadre du RAMED, 8,5 millions de Marocains vivant sous le seuil de pauvreté, soit un peu moins de 30 % de la population, vont bénéficier de la gratuité partielle ou totale des frais de traitement dans les hôpitaux publics. 

« Le RAMED représente une réforme importante pour la justice sociale et la redistribution des opportunités », a indiqué M. Sidibé. « Fournir une protection sociale aux populations vulnérables est une stratégie fondamentale dans la riposte au VIH », a-t-il ajouté.

Reconnaissance de la contribution de la Princesse Lalla Salma 

Plus tôt dans la journée, M. Sidibé avait rencontré la Princesse Lalla Salma du Maroc, épouse du Roi
Mohammed VI et Présidente de l'Association Lalla Salma de Lutte contre le Cancer, un organisme national à but non lucratif. Il a remercié la Princesse pour sa participation à la Réunion de haut niveau de l'Assemblée générale des Nations Unies sur le sida l'an dernier, ainsi que pour son action et son soutien permanents en faveur des programmes visant à améliorer la santé des femmes et des enfants. Ces dernières années, la Princesse a joué un rôle majeur dans la promotion de l'importance des services intégrés pour la santé reproductive et le cancer du col de l'utérus.

Un appel à la baisse de la dépendance envers l'aide extérieure pour la lutte contre le VIH

Dans le cadre d'une réunion parallèle avec le Ministre marocain de la Santé, M. Sidibé a remercié ce dernier pour ses efforts en faveur de la défense de l'Initiative arabe de lutte contre le sida lors d'une récente conférence organisée en Jordanie. Cette nouvelle initiative devrait intensifier les efforts au niveau national et régional pour l'accomplissement des objectifs de la Déclaration politique de 2011 sur le sida.

Faisant remarquer que le Maroc s'appuie sur l'aide extérieure pour financer 50 % de sa riposte nationale au sida, M. Sidibé a invité les dirigeants du pays à assumer une plus grande part des investissements dans la lutte contre le VIH. « Le Maroc, tout comme l'ensemble du continent africain, a besoin d'un nouveau modèle de financement qui soit conçu et détenu par les pays africains », a-t-il déclaré.

Tout en insistant sur le fait que la grande majorité des médicaments contre le VIH prescrits en Afrique sont importés, M. Sidibé a plaidé pour une production locale de médicaments antirétroviraux. Il a évoqué la nécessité de mettre en place une agence de réglementation africaine unique pour les médicaments, afin d'assurer une mise en circulation plus rapide de médicaments de qualité garantie sur tout le continent.