Reportage
Des progrès pour les adolescentes
15 mars 2019
15 mars 201915 mars 2019« Sans notre voix, ce que vous faites, c’est pour vous, pas pour nous », s’exclam
« Sans notre voix, ce que vous faites, c’est pour vous, pas pour nous », s’exclame Winny Obure, chef de file de la jeunesse et défenseuse des droits des femmes originaire du Kenya, devant les Nations Unies à New York, aux États-Unis.
Elle est soutenue par d’autres jeunes femmes exigeant la suppression des obstacles à leurs droits sexuels et reproductifs et l’autonomisation des adolescentes. Baptisée « Step It Up! », cette manifestation est un appel à l’action pour les adolescentes les plus marginalisées, organisé par l’ONUSIDA, le Réseau ATHENA, les gouvernements australien et namibien et ONU-Femmes, en collaboration avec 25 partenaires des Nations Unies et de la société civile.
Les adolescentes et les jeunes femmes sont encore touchées de manière disproportionnée par le VIH. Un million d’adolescentes vivent aujourd’hui avec le VIH dans le monde et, chaque semaine, 7 000 adolescentes et jeunes femmes sont infectées par le VIH. L’accès à une éducation sexuelle complète est si limité que les niveaux de connaissance sur la prévention du VIH chez les jeunes n’ont pas évolué depuis 20 ans.
« Nous n’atteindrons pas les Objectifs de développement durable si les voix et les aspirations des adolescentes sont réprimées », déclare Gunilla Carlsson, Directrice exécutive adjointe de l’ONUSIDA, Gestion et gouvernance. « Où est la responsabilité envers les millions d’adolescentes laissées pour compte ? ».
Bien trop souvent, les adolescentes restent invisibles pour les décideurs, en particulier lorsqu’elles appartiennent à des groupes souffrant de discrimination, criminalisés ou stigmatisés. Comme le soulignent un grand nombre de participants, elles sont victimes de violations des droits de l’homme, notamment de violences et de pratiques néfastes, et se voient nier leurs droits et leur santé en matière sexuelle et reproductive.
« Nous devons sortir de ces salles de réunion et aller dans les communautés pour parler avec les adolescentes et les jeunes femmes. Nous devons prendre en compte le caractère unique de groupes de filles particuliers, de leurs besoins spécifiques. Nous avons les solutions, il suffit de nous inclure dans le débat », estime Maximina Jokonya, une jeune femme originaire du Zimbabwe.
« Les adolescentes sont souvent ignorées et elles ne sont pas présentes dans les lieux de pouvoir, qui restent entre les mains des hommes », déclare Sharman Stone, Ambassadrice australienne pour les femmes et les filles. Elle met en avant les obstacles auxquels sont confrontées les filles dans la région Pacifique, où on leur refuse l’accès à la contraception et où elles sont victimes de niveaux de violence élevés. Selon elle, l’une des priorités absolues pour l’Australie lors des crises humanitaires est d’assurer l’accès aux services de santé sexuelle et reproductive.
Doreen Sioka, Ministre de l’Égalité des sexes et de l’Enfance de Namibie, évoque la défense des droits des adolescentes et des jeunes femmes, l’éducation sexuelle complète et l’intégration des services de santé sexuelle et reproductive et anti-VIH. Elle souligne les grandes avancées accomplies dans le respect des objectifs internationaux sur le VIH. En Namibie, une nouvelle loi incorpore le droit de tous les enfants d’accéder aux services essentiels : à l’âge de 14 ans, les enfants peuvent désormais passer un test de dépistage du VIH sans l’autorisation de leurs parents ou tuteurs.
Les jeunes femmes présentent lors de cet événement évoquent leurs réalités et leur manque d’opportunités, ainsi que des solutions qui fonctionnent pour améliorer leur vie. Deneka Thomas, venue de la Trinité-et-Tobago, décrit comment elle se sert de l’art dans les écoles pour interagir avec les jeunes gens et jeunes filles lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres traumatisés par les brimades, le viol et d’autres formes de violence.
Raouf Kamel, d’AIDS Algérie, évoque la toute première initiative lancée au Moyen-Orient et en Afrique du Nord pour faire entendre les voix et les expériences de groupes de femmes particulièrement marginalisés. Toutes ont connu des actes de violence, parlant de la période de l’adolescence comme d’un moment crucial de leur vie où les risques pour leur santé et leur sécurité, et en ce qui concerne l’infection à VIH, sont particulièrement marqués.
Les participants concluent qu’il y a encore énormément à faire pour répondre aux besoins et aux droits des adolescents. Investir dans une éducation inclusive de qualité, dans les services anti-VIH et dans les services de santé sexuelle et reproductive, ainsi que dans la santé mentale, est absolument essentiel. D’autres actions majeures incluent la prévention et la riposte aux violences sexistes, la promotion des droits des femmes, l’implication des garçons et l’investissement dans les organisations de jeunesse ainsi que dans les initiatives communautaires pilotées par les jeunes femmes ou agissant en leur faveur.
Cette manifestation a eu lieu le 13 mars, en marge de la 63e session de la Commission sur le statut de la femme.
Déclarations
« Je n’apprends rien parce que les enseignants ne peuvent pas communiquer avec moi. Handicapés et séropositifs au VIH, où faut-il aller pour accéder aux services ? (…) On vous refuse la possibilité d’être un être humain. »
« Nous pouvons aujourd’hui nous exprimer sans être jugés… nous voulons du changement pour les filles, qui revendiquent désormais leurs droits. »
« Pour chaque jeune fille qui contracte le VIH à cause de nos politiques, de nos gouvernements et de nos agences qui ne veulent pas reconnaître que ce sont des jeunes vulnérables qui ont désespérément besoin de soutien. De tout cela, nous sommes coupables. (…) Ces ODD les concernent au premier chef. Elles devront vivre avec quoi que nous fassions, ou pas, aujourd’hui. »