Reportage

Investir dans les droits, l’éducation et la santé des adolescentes et des jeunes femmes pour mettre fin au sida en Afrique occidentale et centrale

02 novembre 2021

Des responsables de gouvernements, de la société civile et des Nations Unies ont renouvelé leur engagement pour réaliser des investissements stratégiques urgents dans les droits, l’éducation et la santé des adolescentes et des jeunes femmes. Lors d’un sommet régional de trois jours sur le VIH/sida organisé à Dakar, au Sénégal, qui s’est achevé par un appel à l’action, l’initiative Education Plus a été saluée pour être une intervention arrivant à point nommé en vue de lutter contre le nombre élevé d’adolescentes et de jeunes femmes qui contractent le VIH dans la région de l’Afrique occidentale et centrale.

L’Initiative Education Plus, une action de sensibilisation politique de haut niveau visant à accélérer les actions et les investissements pour prévenir le VIH, a été lancée en juillet au cours du Forum Génération Égalité sous la forme d’un engagement conjoint de l’ONUSIDA, de l’UNESCO, de l’UNFPA, de l’UNICEF et l’ONU Femmes. Ce programme met l’accent sur l’émancipation des adolescentes et des jeunes femmes, ainsi que sur la réalisation de l’égalité des sexes en Afrique subsaharienne. Il se sert de l’éducation secondaire comme point d’entrée stratégique pour fournir l’offre multisectorielle plus.  L’initiative Education Plus appelle à une éducation secondaire gratuite et de qualité pour l’ensemble des filles et des garçons en Afrique subsaharienne d’ici 2025, à un accès universel à une éducation sexuelle complète, au respect de la santé et des droits sexuels et reproductifs, à l’éradication des violences sexistes et sexuelles, à des passerelles entre le monde scolaire et celui du travail, ainsi qu’à la sécurité et à l’émancipation économiques.

Alors que la région d’Afrique occidentale et centrale a accompli des progrès dans le domaine l’éducation des filles au cours des deux dernières décennies, le rapport 2019 de l’UNICEF a révélé que « la région présente toujours les disparités les plus importantes entre les sexes dans l’éducation au monde ». Une adolescente sur quatre âgée de 15 à 19 ans, mariée ou vivant dans une union, a déjà été victime de violences émotionnelles, physiques ou sexuelles de la part de son mari ou d’un partenaire.

Le VIH/SIDA reste une menace majeure pour la santé publique en Afrique occidentale et centrale. La région compte 4,7 millions de personnes séropositives (12 % de la population séropositive au monde) et recense 22 % de tous les décès dus au sida dans le monde. Les adolescentes et les jeunes femmes (15 à 24 ans) en Afrique occidentale et centrale sont deux fois plus exposées au risque de contamination au VIH que leurs homologues masculins.  Les adolescentes représentent cinq nouvelles infections au VIH sur six (82 % / 18 237 femmes) dans la tranche d’âge des 15-19 ans. Trois quarts (74 %) des nouvelles infections au VIH chez les 15-24 ans de la région concernent des femmes (40 432 femmes/13 860 hommes). 800 adolescentes et jeunes femmes environ sont infectées chaque semaine en Afrique occidentale et centrale. 

L’éducation secondaire offre une protection contre le VIH aux adolescentes et aux jeunes femmes, avec une baisse de l’incidence du virus pouvant atteindre un tiers dans certains pays chez les filles qui terminent l’éducation secondaire.

Cependant, la plupart des pays d’Afrique occidentale et centrale ne parviennent pas à atteindre l’objectif d’allouer 20 % des ressources gouvernementales à l’éducation, comme l’exige l’engagement de Dakar de l’Union Africaine en faveur de l’éducation pour tou-tes. Avant la pandémie de COVID-19, seuls le Burkina Faso, São Tomé et Príncipe, le Sénégal, la Sierra Leone et le Togo accordaient au moins 20 % de leur budget national à l’éducation. En pourcentage du PIB, les dépenses d’éducation varient de 1,1 % en République centrafricaine à 7,7 % en Sierra Leone.

Avant l’arrivée de la COVID-19, près de 34 millions de filles en âge d’aller à l’école secondaire en Afrique subsaharienne n’avaient pas accès à une éducation complète de 12 ans et 24 % environ des adolescentes et des jeunes femmes (15–24 ans) dans la région n’étaient pas scolarisées, ne suivaient pas une formation ou ne travaillaient pas, contre 14,6 % des jeunes hommes.  L’UNICEF estime qu’en 2020, les fermetures d’écoles dues à la COVID-19 ont touché environ 250 millions d’écolier-ères et d’étudiant-es en Afrique subsaharienne, dont des millions risquent de ne jamais retrouver le chemin de l’école, surtout des filles.

À ce jour, cinq pays (Bénin, Cameroun, Gabon, Lesotho et Sierra Leone) ont clairement manifesté leur intérêt pour l’atteinte des objectifs de l’initiative. Ils ont pris de nombreux engagements pour lutter efficacement et de toute urgence contre le nombre alarmant d’adolescentes et de jeunes femmes qui contractent le VIH et meurent de maladies opportunistes. Ces deux dangers parmi d’autres comme les violences sexuelles et sexistes ou les grossesses adolescentes menacent leur survie, leur bien-être, leurs libertés et leurs droits humains. 

L’initiative Education Plus s’engage à promouvoir le leadership des jeunes femmes comme clé pour mettre fin au sida en tant que menace de santé publique et pour reconstruire les communautés et les pays pendant et après la pandémie.

Déclarations

« Les leçons tirées du succès de l’accélération de la parité entre les sexes dans l’enseignement primaire doivent être mises en œuvre pour l’enseignement secondaire. Il est essentiel de garantir que chaque adolescente puisse terminer une éducation secondaire de qualité. C’est pourquoi nous apprécions à sa juste valeur l’initiative révolutionnaire Education Plus visant à émanciper les adolescentes et les jeunes femmes en Afrique subsaharienne, que je codirige avec mes consœurs et directrices exécutives de l’UNESCO, de l’UNICEF, du FNUAP et de l’ONU Femmes. »

Directrice exécutive de l’ONUSIDA. Winnie Byanyima

« Les preuves montrent que le VIH en Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale est une épidémie féminisée, car les femmes et les filles sont les plus touchées par les nouvelles infections au VIH et les plus impliquées dans les soins apportés aux personnes séropositives. Le taux d’infection au VIH incroyablement disproportionné chez les femmes et les filles est alimenté par les inégalités sexistes systématiques, structurelles et institutionnalisées qui désavantagent les femmes et les filles tout au long de leur vie. »

Première Dame de la République de Sierra Leone. Mme Fatima Jabbe-Bio

« En Gambie, nous avons beaucoup d’écoles gouvernementales. À première vue, elles sont gratuites. Mais cela signifie uniquement qu’il ne faut pas payer de frais de scolarité. Certaines familles ont déjà du mal à s’acheter trois repas par jour – et maintenant, elles doivent s’inquiéter de l’achat de livres scolaires. Aux donateurs qui investissent dans l’enseignement secondaire et aux gouvernements qui sont censés le faire, je dis d’investir spécifiquement dans ce dont les élèves ont besoin. »

Fatima Gomez représentante de jeunes femmes, Education Plus Initiative, Gambie.

« L’un des chemins vers l’émancipation des femmes est Education Plus. Si une femme ne va pas à l’école, elle ne pourra pas occuper l’un des 30 % de postes à responsabilité réservés aux femmes au Gabon, qui à leur tour prendront des décisions et adopteront des lois qui autonomiseront d’autres filles. Le pays intensifie actuellement ses efforts pour accroître l’accès à l’éducation, en supprimant les obstacles et en permettant aux adolescentes et aux jeunes femmes de profiter de toutes les mesures mises en place par le gouvernement pour accéder à une éducation de qualité. »

Prisca Nlend Koho ministre des Affaires sociales et des Droits de la femme, Gabon.

« Pour réduire la vulnérabilité des filles au VIH, il est nécessaire de tirer profit des financements de la santé pour catalyser l’impact intersectoriel dans l’éducation, en particulier pour garantir l’accès aux services de santé sexuelle et reproductive pour les adolescentes et les jeunes femmes. »

Safiatou Thiam directrice exécutive, Le Conseil National de Lutte contre le Sida (SE/CNLS), Sénégal

« Le Bénin s’engage à augmenter les financements de l’enseignement secondaire à destination des filles et de la formation des enseignant-es afin de mettre en place un environnement propice. »

Kouaro Yves Chabi ministre de l’Éducation secondaire, technique et professionnelle, Bénin.

« Nous connaissons les solutions, nous avons les moyens. Les dirigeantes et dirigeants doivent maintenant être prêts à prendre des mesures radicales. Cette situation d’urgence appelle des mesures radicales ! »

Manuel Tonnar directeur, Direction de la Coopération au Développement et de l’Action humanitaire, Luxembourg.

« Les adolescentes qui atteignent les dernières années de l’école primaire et les premières années de l’école secondaire sont confrontées à de multiples obstacles. Pour y répondre, nous devons adopter une approche multisectorielle qui non seulement satisfait leurs besoins en matière d’éducation, mais aussi leurs besoins économiques, de protection, de nutrition, de santé et d’hygiène menstruelles, ainsi que de prévention du VIH. »

Félicité Tchibindat directrice régionale adjointe de l’UNICEF, région Afrique de l’Ouest et centrale.

Sommet régional sur le VIH