Reportage

Tuberculose chez les personnes séropositives : baisse générale des décès, mais des disparités inquiétantes persistent

24 mars 2021

Dans le monde, le nombre de personnes séropositives mortes de la tuberculose, une maladie pouvant être évitée et soignée, est passé de près de 600 000 en 2010 à tout juste 200 000 en 2019, soit une baisse de 63 %. En 2016, les Nations Unies ont fixé un objectif mondial consistant à réduire de 75 % le nombre de décès dus à la tuberculose chez les personnes vivant avec le VIH entre 2010 et 2020. Fin 2019, neuf pays (Djibouti, Érythrée, Éthiopie, Inde, Malawi, Afrique du Sud, Soudan, Thaïlande et Togo) avaient atteint, voire dépassé cet objectif avec un an d’avance.

Évolution du pourcentage et du nombre de décès liés à la tuberculose chez les personnes vivant avec le VIH, 2010-2019

Des progrès supplémentaires venant soutenir les objectifs mondiaux ont été accomplis pour élargir la disponibilité du traitement préventif de la tuberculose aux personnes séropositives. Ce dernier réduit considérablement le risque de contracter et de mourir de la tuberculose. En deux ans seulement, en 2018 et 2019, 5,3 millions de personnes vivant avec le VIH ont reçu un traitement préventif qui leur la vie. L’objectif 2022 fixé à 6 millions dans la Déclaration politique des Nations Unies de 2018 sur la tuberculose est ainsi d’ores et déjà atteint à 88 %.

Il est certes bon de saluer les progrès accomplis par certains pays, mais ceux-ci masquent de nombreuses inégalités et disparités persistantes au niveau de la fourniture de la prise en charge intégrée optimale des personnes vivant avec le VIH et la tuberculose. On estime que 208 000 décès dus à la tuberculose en tant que maladie opportuniste sont imputables à ces disparités en 2019, soit un décès sur trois lié au sida.

« La prise en charge des enfants est l'un des talons d’Achille de la riposte mondiale au VIH et à la tuberculose », a déclaré Shannon Hader, directrice exécutive adjointe de l’ONUSIDA responsable des programmes. « Nous disposons aujourd’hui de bien meilleurs outils de prévention, de diagnostic et de traitement de la tuberculose, pharmacorésistante ou non, chez les jeunes enfants, mais ils ne suffisent toujours pas. Trop d’enfants n’ont toujours pas accès à ces nouveaux outils. Parfois, le personnel de santé n’ose pas traiter la tuberculose chez les enfants séropositifs, par un instinct de protection et par peur de faire plus de mal que de bien. Les enfants sont alors « protégés jusqu’à leur mort. » Nous devons instaurer la confiance pour affronter la tuberculose et le VIH chez les jeunes enfants et atteindre des objectifs qui feront la différence.

La tuberculose est particulièrement difficile à diagnostiquer chez les nouveau-nés et les jeunes enfants vivant avec le VIH, surtout lorsqu’ils ont moins de deux ans. Les formes les plus graves de la tuberculose (tuberculose miliaire et méningite tuberculeuse) sont répandues au sein de cette tranche d’âge et peuvent être mortelles en l’absence d’un diagnostic et d’un traitement rapides. Des progrès importants ont toutefois été réalisés pour améliorer le diagnostic de la tuberculose chez les enfants. La Stop TB Partnership Global Drug Facility met à disposition à un prix abordable des médicaments spécialement conçus pour soigner et protéger ce groupe. La difficulté consiste à démocratiser ces innovations et la qualité nécessaire pour atteindre tous les enfants séropositifs qui en ont besoin.

Un élément de l’initiative confessionnelle du Plan d’urgence du Président des États-Unis pour la lutte contre le sida et le Plan d’action de Rome sur le VIH et la tuberculose pédiatriques de l'ONUSIDA, œuvrent pour réduire les écarts chez les enfants vivant avec le VIH. Il s’agit d’un partenariat multipartite unique en son genre qui encourage une collaboration sans précédent parmi la communauté confessionnelle, le secteur privé, les législateurs, les donateurs et d’autres acteurs. Son ambition consiste à accélérer le développement et la mise en œuvre de meilleurs tests, mesures de prévention et traitements pour le VIH et la tuberculose chez les enfants séropositifs.

En 2019, on estime que moins de la moitié (49 %) des 815 000 personnes vivant avec le VIH et la tuberculose ont été recensées comme recevant un traitement pour les deux maladies. Cela montre bien qu’il reste encore fort à faire pour combler les lacunes entre le dépistage, le test et le traitement pour le VIH et la tuberculose. Afin d’améliorer cette situation, les programmes nationaux doivent transcender les infrastructures de santé traditionnelles en vue d’identifier les millions de patients et patientes qui ont toujours besoin d’un traitement pour le VIH, la tuberculose ou les deux. Une approche intégrée, reposant sur les communautés et centrée sur les personnes est ainsi nécessaire. Le dépistage de plusieurs maladies au sein des familles et des communautés (tuberculose, VIH, COVID-19, hypertension artérielle, diabète et autres affections répandues) permet de lutter contre la stigmatisation et de réduire les coûts pour les programmes et les personnes. Il est primordial d’inviter les personnes venant de recevoir un diagnostic positif au VIH, à la tuberculose ou à la COVID-19, à autoriser le dépistage confidentiel de leur famille, des membres de leur foyer et de leurs contacts au sein de leur communauté, y compris des enfants et des ados.

Le compte à rebours est déjà lancé si nous souhaitons atteindre les nouveaux objectifs ambitieux de la tuberculose et du VIH pour 2025 tels qu’énoncés dans la nouvelle stratégie mondiale de lutte contre le sida pour 2021–2026. Atteindre ces objectifs permettrait à l’humanité de combler son retard pour mettre fin à ces deux maladies d’ici 2030. Cela requiert une riposte collaborative et intégrée pour les pandémies de tuberculose, du VIH et de la COVID-19. Elle doit s'enraciner dans les communautés affectées et prendre en compte les besoins des personnes les plus durement touchées. Lutter contre les inégalités qui favorisent la tuberculose et le VIH permettra de résorber la « fracture mortelle » entre les engagements internationaux et la réalité vécue par les communautés touchées par la tuberculose et le VIH. En mettant fin aux inégalités, nous pouvons faire en sorte que les adultes, les jeunes et les enfants vivant avec le VIH ne succombent plus à la tuberculose.

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