Reportage

Suivre les progrès réalisés contre les discriminations

12 juillet 2019

Les lois peuvent créer différents types de discriminations envers les personnes, mais la criminalisation est l’une des formes les plus dévastatrices. Malgré tous les appels en faveur de réformes et les engagements dans le cadre du Programme de développement durable à l’horizon 2030 en vue de mettre fin aux lois discriminatoires et réduire les inégalités, le constat est le suivant :

  • soixante-neuf pays continuent de criminaliser les relations sexuelles entre personnes de même sexe.
  • Plus de 100 nations criminalisent la consommation ou la possession personnelle de drogue et 98 criminalisent certaines formes du commerce du sexe.
  • Une personne incarcérée sur cinq l’est à cause d’un crime lié à la drogue et 80 % d’entre elles le sont suite à la possession personnelle ou la consommation.
  • Dix-neuf pays expulsent les étrangers en raison de leur statut sérologique.

Du 9 au 18 juillet, un forum politique de haut niveau se réunit aux États-Unis, à New York. Les participants passeront en revue les progrès réalisés par les États membres concernant leurs engagements en vue d’atteindre les objectifs de développement durable, notamment ceux portant sur les inégalités et la paix, la justice et des institutions fortes.

« Dans mon travail de juge, je vois l’effet que le droit pénal peut avoir sur des communautés. Il écarte des personnes des systèmes de protection, invalide la légitimité de leurs actions ou de leur identité, augmente la stigmatisation et les exclut de toute protection offerte par nos systèmes judiciaire, social et économique », explique Edwin Cameron, juge auprès de la Cour constitutionnelle d’Afrique du Sud.

La criminalisation a des répercussions sur l’accès aux services de santé, au logement, à l’éducation, à la protection sociale et à l’emploi. La criminalisation des relations sexuelles entre personnes du même sexe, du commerce du sexe ou de la consommation de drogue empêche des personnes d’avoir accès aux services de santé, y compris à la prévention, au dépistage et au traitement du VIH. Les données montrent que les gays et autres hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes ont 28 fois plus de risques d’être contaminés par le VIH que le reste de la population, ce taux est 22 fois plus élevé pour les personnes s’injectant de la drogue et 13 fois supérieur pour les professionnel(le)s du sexe et les femmes transgenres. 

« Si nous voulons mettre en place complètement l’objectif de développement durable et être sûrs de n’oublier personne, alors nous devons nous assurer que les lois protègent les personnes des discriminations et ne les forcent pas à vivre dans l’ombre de la société », explique Lloyd Russel Moyle, membre du Parlement britannique.

Les groupes représentant des personnes criminalisées ne peuvent souvent pas se déclarer en tant qu’organisation non gouvernementale, et, par exemple, les professionnel(le)s du sexe ne peuvent généralement pas former de syndicat. Les lois dites de propagande, quant à elles, peuvent par exemple interdire la diffusion d’information sur la prévention du VIH.

« Il n’est pas possible de mettre fin au sida et de remplir les objectifs de développement durable sans prendre en compte la discrimination, la violence et l’exclusion. Nous avons la possibilité de tirer des leçons du mouvement de lutte contre le sida et de placer au centre de la riposte les droits et la participation à bon escient des personnes les plus marginalisées », ajoute Luisa Cabal, directrice des droits de l’homme et du genre à l’ONUSIDA.

Les groupes criminalisés sont souvent davantage victimes de violences que le reste de la population. Ils signalent rarement les crimes perpétrés à leur encontre à la police, et les avocats s'exposent à des violences ou d'autres répercussions s’ils acceptent de les représenter.

« La discrimination des personnes vivant avec le VIH et leur criminalisation n’ont pas disparu aujourd’hui. Et nous sommes confrontés en Indonésie à la stigmatisation persistante de populations clés et à leur criminalisation. Nous ne mettrons jamais fin au sida si nous ne faisons pas de leurs besoins et de leurs droits une priorité absolue quant à l’accès aux soins de santé, à la protection contre la violence et à la concrétisation du droit à la santé », continue Baby Rivona, de l’Indonesian Positive Women Network.

Les pays qui dépénalisent la consommation de drogue et proposent des services de réduction des risques voient souvent reculer le nombre de nouvelles infections au VIH. Il est prouvé que, sur 10 ans, la décriminalisation du commerce du sexe pourrait empêcher 33 % à 46 % des nouvelles infections parmi les professionnel(le)s du sexe et leurs clients. Cependant, l’effet ne se limite pas à la baisse des nouvelles infections. La décriminalisation améliore le bien-être et renforce la confiance accordée à la police, réduit la violence et augmente l’accès aux soins de santé et aux services d’assistance. Mais surtout, elle permet aux personnes de ne plus être considérées comme des criminels et stigmatisées par la société.

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Rapport

SDGs and the HIV response