Hind Khatib-Othman, Directrice de l'équipe de l'ONUSIDA d'appui aux régions pour le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord, présentant le rapport en compagnie de Hamidreza Setayesh, Conseiller régional du programme de l'ONUSIDA, Noha El-Mikawy, représentante de la Ford Foundation, MENA, et Rita Wahab, Coordinatrice régionale de MENA-Rosa.
Dans un nouveau rapport de l'ONUSIDA présenté aujourd'hui au Caire, en Égypte, et intitulé « Standing Up, Speaking Out » (Se lever et prendre la parole), 140 femmes vivant avec le VIH originaires de 10 pays du Moyen-Orient et d'Afrique du Nord s'expriment sur les réalités qui forment les espoirs et les peines de leur vie. Les voix qui se font entendre dans ce rapport sont celles des membres de MENA-Rosa, le premier groupe régional dédié aux femmes touchées par le VIH.
À travers des rencontres en face à face et la constitution de réseaux longue distance, MENA-Rosa offre aux femmes vivant avec le VIH l'opportunité de parler de leurs nombreuses tentatives et de leurs victoires occasionnelles dans leur gestion du VIH au quotidien, des problèmes médicaux aux affaires familiales. Mais pour que le changement prenne pied dans leurs vies personnelles, les membres de MENA-Rosa ont pour objectif de dresser un tableau général de la situation, de favoriser la prise de conscience des principaux décideurs quant à leurs nombreux besoins, et lever des fonds pour atteindre leurs buts.
« Il y a beaucoup à faire pour les femmes vivant avec le VIH dans la région du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord. Elles sont confrontées à des situations spécifiques et ont des besoins particuliers », explique Hind Khatib-Othman, Directrice de l'équipe de l'ONUSIDA d'appui aux régions pour le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord. « Il existe des solutions, mais il faut lutter contre la stigmatisation et favoriser la prise de conscience. Tous les efforts de protection des droits des femmes devraient inclure les droits de celles qui vivent avec le VIH ».
On estime à 470 000 le nombre de personnes vivant avec le VIH au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, dont environ 40 % de femmes. Dans une région qui reste l'une des deux seules où les infections à VIH et les décès liés au sida continuent d'augmenter, ce nouveau rapport met au jour un ensemble complexe de facteurs sociaux, culturels et économiques qui rendent les femmes extrêmement vulnérables à l'infection.
Dans le rapport, l'un après l'autre, ces témoignages révèlent que les informations sur la vie avec le VIH sont au mieux minimales, sinon carrément inexistantes, ce qui affectent profondément la vie de ces femmes, souvent confrontées à la stigmatisation et la discrimination en raison de leur séropositivité au VIH. « Au départ, lorsqu'ils ont su que j'étais infectée, ma famille m'a interdit de dormir ou de m'asseoir aux côtés de ma fille. Ils me l'ont enlevée. Plus tard, ils ont commencé à comprendre qu'il n'y avait pas de problème », révèle une femme vivant avec le VIH au Yémen.
J'espère qu'à l'avenir les gens seront plus ouverts et que les personnes vivant avec le VIH ne seront pas mises en marge de la société. Nous n'avons pas cherché à attraper cette maladie, nous n'avons pas choisi de l'avoir
Une femme algérienne vivant avec le VIH
Le nouveau rapport souligne que les femmes qui adoptent des comportements à risque, comme le commerce du sexe ou la consommation de drogues injectables, sans protection adéquate sont très largement susceptibles d'être infectées par le VIH. Certaines femmes sont infectées par leur mari et d'autres parce qu'elles sont victimes de pratiques traditionnelles néfastes comme le mariage précoce. La dépendance économique, qui limite le pouvoir des femmes de négocier des rapports sexuels protégés ou de se libérer de relations violentes, est également associée à un risque accru d'infection à VIH. La violence sexiste est monnaie courante au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, comme le montrent plusieurs études nationales.
Le rapport indique également que la santé sexuelle et reproductive relève d'une situation d'urgence. On estime à environ 20 000 dans la région le nombre de femmes enceintes qui ont besoin de services de prévention de l'infection à VIH chez l'enfant, alors que seulement 5 % d'entre elles environ bénéficient des soins requis.
« Les femmes ont été au cœur des changements qui ont frappé une région où la population est descendue dans la rue pour exiger une vie dans le respect de la dignité, de l'égalité, de la justice et des droits humains », explique Amr Waked, acteur, militant et Ambassadeur itinérant de l'ONUSIDA dans la région. « Ce sont les mêmes exigences que les femmes vivant avec le VIH et elles ne méritent pas moins ».
L'éducation, la prévention du VIH et l'accès à un traitement anti-VIH de qualité sont des éléments clés de la solution, selon le rapport. Il convient de ne pas ménager les efforts pour engager les gouvernements, les chefs religieux et les dirigeants communautaires à changer les politiques, promouvoir l'égalité des sexes et lutter contre la stigmatisation.
Rita Wahab, Coordinatrice régionale de MENA-Rosa, s'exprimant lors du lancement du rapport « Standing Up, Speaking Out », avec Hamidreza Setayesh, Conseiller régional du programme de l'ONUSIDA.
Ce nouveau rapport récapitule les changements et les recommandations mis en avant par les femmes vivant avec le VIH dans la région du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord. Parmi ces changements figurent l'amélioration de l'accès à une éducation et des emplois de qualité pour les femmes et les filles ; l'accès garanti aux meilleurs soins disponibles pour le VIH, notamment un traitement antirétroviral durable ; une formation spéciale pour les médecins et les infirmières afin de réduire la stigmatisation et la discrimination envers les personnes vivant avec le VIH ; et un meilleur accès aux informations et aux services de santé sexuelle et reproductive, notamment la prévention et le dépistage du VIH, pour les femmes mariées comme pour les femmes célibataires.
« J'espère qu'à l'avenir les gens seront plus ouverts et que les personnes vivant avec le VIH ne seront pas mises en marge de la société. Nous n'avons pas cherché à attraper cette maladie, nous n'avons pas choisi de l'avoir », explique une femme algérienne vivant avec le VIH.
Même si la tâche est vaste, la région du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord n'en est encore qu'au stade précoce d'une épidémie majeure et elle a l'opportunité d'arrêter net la progression du VIH. Des groupes comme MENA-Rosa font entendre leur voix et militent pour une réforme. Le changement d'ordre politique au Moyen-Orient et en Afrique du Nord implique de nouveaux défis et de nouvelles opportunités pour une vie meilleure pour l'ensemble des citoyens. Quant aux femmes vivant avec le VIH, les changements qu'elles espèrent voir ne viendront jamais assez tôt.